« V comme vegan » de Théo Ribeton
Les éditions Nova lancent Parallaxe, une nouvelle collection voulant offrir une lecture résistante du monde contemporain. Et c’est un pari gagné dès le premier essai, « V comme vegan » de Théo Ribeton, qui dresse un état des lieux social et culturel du mouvement végane aussi pertinent (et parfois impertinent;) que positif!
Il fait du bien l’optimisme de Théo Ribeton: « L’émancipation animale est dans l’air du temps: comment ne pourrait-elle pas être pour demain? »!
Bien sûr, si vous lisez ces lignes il y a de fortes chances que vous ne doutiez pas, comme moi, une seule seconde de ce constat. Mais il est toujours bon que celui-ci soit formulé publiquement!
En effet, Théo Ribeton, journaliste et critique de cinéma pour Les Inrocks et Stylist entre autre, se propose d’offrir une vision à contre-courant de celle (passionnante mais néanmoins pessimiste) défendue par Florence Burgat dans son essai « L’Humanité carnivore », qui relie la consommation de viande à un instinct primaire de dévoration, au besoin de tuer. Laissant ainsi peu d’espoir à l’idée d’une possible humanité végane…
Persuadé que nous sommes déjà dans un monde qui bascule, préférant d’ailleurs parler « de thérapie de groupe » plutôt que de « l’affrontement de deux camps », Théo Ribeton fait ici le point sur cette petite révolution lente qu’est la dynamique végane.
S’inspirant de Martin Gibert pour qui « les arguments pour le véganisme étaient déjà présents il y a quarante ans dans La Libération animale de Peter Singer. Ce n’est plus très intéressant d’un point de vue philosophique. », Théo Ribeton ne propose pas de grand débat d’idées (bien que son point de vue se révèle comme une voix qui compte) mais un état des lieux touchant des thèmes aussi variés que:
-L’histoire et la place du véganisme dans le média de masse par excellence qu’est la télévision.
-La légitimité ou non, d’un sentiment d’hostilité envers les végétariens (végéphobisme).
-« L’Ecole de Montréal », ce mouvement d’intellectuels québécois et français très actifs sur les questions de la cause animale. Et qui se réunissent notamment au sein de la revue « Véganes ».
-Le point sur la cuisine végétale et l’exigence d’excellence que l’on doit avoir pour elle. Ainsi que l’intérêt qu’elle suscite chez de nombreux grands chefs venant pourtant d’horizons très carnés… Car comme le dit Lionel Giraud, chef étoilé ayant relevé le défi vegan de L214: « En viande, la valeur ajoutée, c’est le produit. En végétal, c’est le cuisinier. »
-Le formidable travail d’associations comme L214 et les batailles qu’ils leur restent à gagner, notamment sur le terrain politique.
-Mais également la connexion entre la lutte pour la protection animale et le féminisme. Arguments développés par Carol J. Adams il y a vingt-six dans « La Politique sexuelle de la viande » et qui sont toujours autant d’actualité aujourd’hui… Théo Ribeton se permet également de rappeler l’attitude pour le moins ambiguë de l’association PETA à ce sujet. Qui, si elle est très puissante et efficace sur les questions de défense animale, continu de véhiculer l’image de la femme-objet pour faire passer son message…
-Enfin, et cela ne pourrait être plus d’actualité, la place de la protection animale dans les discours politiques. Ainsi qu’un décryptage du lobby de la chasse et l’analyse de l’existence, ou non, d’un lobby végétarien.
Voila donc un livre passionnant, réjouissant, où Théo Ribeton souhaite dire au militants véganes « qu’ils ne sont plus si seuls ». Et qu’ils ont créés un mouvement « post-militant » qui « emporte la société tout entière dans un grand glissement, une lente migration des valeurs. »
Prochain chantier peut-être pour Théo Ribeton: devenir lui-même végane?;) Végétarien convaincu depuis cinq ans, il assure « avoir la pression » suite à l’écriture de ce livre et qu’il franchira bientôt le pas…
« V comme vegan » de théo Ribeton, 18€ aux Editions Nova